mercredi 30 avril 2014

Du cerveau à l'apprentissage: un chemin semé de mythes!

"Les neuromythes sont des croyances erronées sur le fonctionnement du cerveau humain." (Steve Masson)

Utilisez-vous plus votre cerveau droit ou gauche? ... ou les deux?

Est-ce votre cerveau gauche ou votre cerveau droit qui domine votre personnalité, vos manières de percevoir le monde, votre méthode naturelle d'apprentissage? Peut-être avez-vous tenté de répondre à de telles questions en remplissant des questionnaires trouvés sur internet ou dans des magazines? Si de telles croyances n'ont rien de nocif méfiez-vous quand même de la dictature du cerveau qui règne actuellement dans les sphères "neuro" et "psy".

"La polarisation entre cerveau gauche et cerveau droit est largement invoquée dans l'art, les affaires, l'éducation, la littérature et la culture, mais elle doit plus à la puissance du mythe qu'à la preuve scientifique." Ainsi s'exprime le scientifique Michael C. Corballis dans un article publié en janvier dernier dans la revue PLOS Biology et dans lequel il dénonce quelques fantaisies au sujet de l'asymétrie du cerveau.

Déjà en août 2013, le Huffington Post relayait l'information selon laquelle des scientifiques américains venaient de dissiper le mythe de la polarisation des fonctions cognitives assurées par nos cerveaux droit et gauche. Cette news s'appuyait sur l'article publié par le groupe de Jeffrey S. Anderson (université de Utah) dans la revue PLOS One le 14/08/2013.

Que nous apprend cet article? En substance, "les chercheurs américains ont réussi à prouver que ce phénomène de latéralisation n'existait pas", résume le journaliste Baptiste Piroja-Pattarone. Plus précisément, il faut comprendre que "les connections fonctionnent en fait par paire: ainsi donc, une connexion qui se déroule dans une région de la partie gauche de votre cerveau entraîne une connexion similaire dans la même région de la partie droite. Il y a donc une corrélation cérébrale entre les deux hémisphères du cerveau et non pas une partie du cerveau plus mobilisée que l'autre."

Il en va en réalité de même pour la célèbre théorie du cerveau triunique qui postule l'existence de trois cerveaux distincts apparus successivement au cours de l’évolution de l'espèce humaine : un cerveau reptilien, puis un cerveau paléomammalien (apparenté au cerveau limbique) et enfin un cerveau néomammalien (apparenté au néocortex). Introduite par Paul Mac Lean en 1969, et vulgarisée par Arthur Koestler, cette conception de l'organisation neuroanatomique est aujourd'hui fortement remise en question. La critique est semblable à celle adressée à l'hypothèse de la polarisation du cerveau: la possibilité d'une indépendance totale de trois cerveaux distincts est rejetée par de nombreux scientifiques au profit d'un modèle théorique contraire considérant les aires cérébrales comme des ensembles en interaction.

Quel est l'intérêt de faire toutes ces mises au point au sujet de croyances largement répandues mais fantaisistes concernant le fonctionnement de notre cerveau? La raison principale qui motive notre démarche est de dénoncer certains propos qui prennent ces croyances pour des vérités et qui, au nom de ce prétendu savoir, se permettent de donner des leçons! Voici quelques exemples parmi bien d'autres:

- "Souvent considéré comme non-dominant, l’hémisphère droit du cerveau est mis de côté, ce qui peut se traduire par l’enseignement dans les écoles, car on privilégie la logique à la création." (source)

"Ce n’est sans doute pas un hasard si le moment où l’on découvre les potentialités du cerveau droit correspond à l’émergence d’un grand mouvement d’émancipation des femmes." (source)

- "Comment coordonner les 2 hémisphères? En pratiquant le Mind Mapping: Un Mind Map contient des mots (cerveau gauche), des couleurs, des images (cerveau droit). Les informations sont structurées, organisées (cerveau gauche). La carte donne une vision globale de l’information (cerveau droit)." (source)

De toute évidence, ceux qui postulent la division du cerveau en régions fonctionnellement autonomes (hémisphères droit et gauche, cerveaux reptilien, limbique, etc.) ne font qu'utiliser leur cerveau gauche... Plus sérieusement, posons-nous la question: à quoi pourrait bien nous servir une telle organisation de notre cerveau pour apprendre, mémoriser, se préparer aux examens, etc.? Outre le fait qu'il s'agit là de théories pseudo-scientifiques, ne nous éloigne-t-on pas de l'essentiel? En fait, certains auteurs habiles font fortune sur le dos de ces croyances. Mais nous, qu'allons-nous retenir comme leçon?

Je ne retiendrai qu'un exemple, celui du Mind Mapping. Bien que son "inventeur", Tony Buzan, ait eu largement recours - à son insu ou non - à des neuromythes, il s'agit d'une méthode d'apprentissage tout à fait intéressante. Au fond, elle ne fait que mettre en pratique des principes de mémorisation ancestraux, accessibles à tous et dont les origines neurologiques importent peu:
Autant de principes qui n'exigent pas de développements techniques sophistiqués, mais un travail d'étude méthodique tel que nous essayons de le présenter dans ce blog.

Nathanaël LAURENT

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